Expédition au San Valentin.

La Patagonie est depuis longtemps un mythe dans l’esprit de nombreux alpinistes, entretenu par de nombreux récits d’ascensions plus ou moins réussi pour cause de météo capricieuse, mais toujours dans des paysages magnifiques. Notre projet était à l’origine, l’ascension du San Valentin, le plus haut sommet de la Patagonie.Au mois de décembre un vol touristique en hélicoptère avait survolé l’arête sommitale de ce magnifique sommet, mettant en évidence une arête tout en glace vive d’une belle couleur bleue. Dès lors il devenait difficile pour nous d’envisager de gravir ce sommet, à moins d’équiper de cordes fixes toute l’arête, ce qui impliquait de nombreux portages supplémentaires.

Après maintes réfléxions j’ai choisi de nous tourner vers l’ascension d’un sommet plus modeste de 3000 m d’altitude, le Cerro Hyades, situé en bordure est du champ de glace.

Nous avons démarrer notre aventure par un petit trek de 3 jours dans le secteur du Rio Soler, avec passage de tyroliennes, campement au bord d’un lac et remontée d’un couloir en neige de 400 m avec de bon sacs à dos et une section à 45°. La descente sur le lac Leones restera un grand souvenir pour tous, lorsque nous sommes tombés dans un maquis infranchissable, puis pour finir assailli par des nués de taons à l’appétit féroce. Nous commencions à découvrir le vrai visage de la Patagonie, celui que l’on ne voit pas sur les cartes postale, mais qui est réellement là. La Patagonie c’est aussi rude que magnifique!

Nous attaquons ensuite la montée vers les camps de Punta Camello puis le camp Italien, avant de pénétrer réellement sur le champ de glace. Là aussi nous avons redécouvert ce qu’était le portage, avec des sacs à 30 kg à travers une forêt difficile et toujours les taons bien sur. Certes ce fût dur mais le camp de Punta Camello est superbe, dominant tout le glacier qui descend se jeter dans le lac Leones en contre bas. Nous avons aussi compris l’utilité des porteurs Népalais et réaliser combien il est difficile de porter des charges lourdes.

Il nous faut ensuite acheminer notre matériel au camp Italien, ce qui représente encore un bel effort. Traversée de glacier, escalade facile dans les rochers, montée dans la neige très très molle car il fait très chaud, et pour finir nous arrivons enfin au camp Italien magnifiquement situé en bordure du glacier descendant du champ de glace et par lequel nous prendrons pied sur ce dernier pour continuer notre progression.

Nous sommes obligé de faire un deuxième portage de matériel, ce qui nous fait dormir à nouveau à Punta Camello. Durant tous ces aller retour, les températures sur la montagnes furent vraiment très haute, ce qui m’inquiétait un peu pour la suite de notre expédition, dans la mesure ou nous serions obligé de traverser des zones de glacier très crevassé. Les sommets de Patagonie ne sont pas très élevé en moyenne et l’altitude du champ de glace est d’environ 1500 m. Lorsqu’il fait plus de 30 ° dans le bas de la vallée on peut imaginer qu’il ne fait pas très froid non plus sur le champ de glace. Nous avions tout de même pris des raquettes et des petits ski pour progresser plus haut.

Les couchers de soleil que nous avons eu depuis le camp Italien furent superbes et l’emplacement du camp est vraiment superbe. Le jour J arrive, nous partons pour le camp Cristal, situé au pied du Cerro Cristal sur le champ de glace. Il faut d’abord franchir le glacier descendant du col ouvrant l’accès au champ de glace et qui est vraiment très crevassé en cette saison. La progression se fait d’abord par une arête neigeuse facile, puis il faut tirer au milieu du glacier, pour louvoyer ensuite entre les crevasses. Ce matin il fait 11° au lever du jour et la neige est complètement pourrie, puisqu’il ne gèle plus depuis plusieurs jours. Je suis devant à la trace et j’enfonce jusqu’au genoux avec mon sac à dos de 25 kilos. Au bout de quelques pas, je me rends compte qu’avec une telle charge dans une neige si molle, celka devient vraiment dangereux de progresser sur des ponts de neige immenses, et je décide de laisser nos affaires sur place et de continuer léger.

Nous sommes encordés au maximum de longueur de corde et je louvoie dans tous les sens pour trouver le chemin. Ma décision est d’aller gravir le sommet du El Mocho et de redescendre dormir au camp Italien ce soir, pour faire le point sur la situation et la météo en même temps. Il est clair qu’avec cette canicule les glaciers deviennent dangereux. La montée au sommet du Mocho se fera dans une neige transformée en profondeur, du gros sel jusqu’à la glace sous jacente, mais le sommet est là et superbe, offrant une vue incroyable sur tous les sommets du champ de glace. Au loin on distingue la laguna San Raphaël, le lointain sommet du San Lorenzo, de l’Arenales, cette calotte glaciaire est vraiment immense et magnifique. Nous redescendons sur le camp Italien pour faire le point sur la situation météo et la suite de notre expédition.

J’appelle Philippe au camp de Terra Luna pour qu’il me donne la météo des jours suivants afin de voir ce qui est envisageable de faire. Nous avons encore deux jours de beau et après retour du mauvais temps pour au moins 3 jours. Compte tenue du fait que nous avons encore 6 jours de nourriture, et qu’il faut 6 jours aller retour pour aller faire le sommet du Cerro Hyades, avec trois jours de mauvais temps, tout tentative devient inutile, si ce n’est de tester le mauvais temps sur le champ de glace et la tenue des tentes dans des vents souvent très violents. Je prends donc la décisions difficile mais sagement murie de tenter un autre petit sommet à côté du Cerro Cristal et de redescendre dans la vallée. Cela sonne le glas de notre aventure en montagne, mais la raison l’emporte sur la passion et il faut savoir renoncer quand les conditions ne sont pas là.

J’en tire comme conclusion que la Patagonie souffre aussi cruellement du réchauffement climatique et fait face maintenant à des températures de plus en plus élevés l’été. L’altitude moyenne de ces glaciers et sommets n’étant pas haute, l’impacte se fait sentir encore d’avantage, et il faut vraiment envisager d’aller faire ce genre d’expédition au printemps, afin d’avoir des glacier plus enneigé et surtout des conditions de gel correct.

Nous avons pu tout de même gravir deux petits sommets et surtout découvrir la beauté de ces montagnes immenses, baignant dans une multitude de lacs aux couleur bleue émeraude. C’est vraiment un pays de contrastes incroyables ou la nature est encore souveraine et ou le mot solitude retrouve toute sa signification.

Voilà quelques photos de notre périple, et bientôt le montage d’une petite vidéo.

A bientôt sur les ski

Pierre